Mégapole de plus de 12 millions d’habitants, Kinshasa abrite, depuis quelques temps, une nouvelle forme de commerce informel des biens importés d’Europe, souvent usagés, et quelques fois neufs, appelés communément Bilokos, une déformation kinoise de l’anglais, «bill of cost (facture de frais)», allusion faite autrefois à ces biens consignés dans un véhicule d’occasion acheté en Europe, pour récupérer l’argent de son fret à l’arrivée aux ports de Matadi ou de Boma. Gros plan sur ce nouveau business de plus en plus prisé par les Kinois.
En effet, ce qu’il convient le marché «Bilokos» a fini par gagner du terrain dans la capitale congolaise… Les communes de Kalamu, Kasa-Vubu et Ngiri-Ngiri sont considérées le nouveau royaume de la vente de ces biens importés d’Europe, voire d’Amérique du Nord! On y trouve pêle-mêle-mêle les appareils électroménagers, les appareils de salon de beauté, les ustensiles de cuisine, des produits cosmétiques, les instruments de travail des pièces de rechanges, des pneus, des jouets, des sacs, des chaussures, des vêtements, et récemment des livres… Le tout désormais rangé sens dessous dessus dans des parcelles prises en location à cette fin! Des vendeurs locaux côtoient des Congolais de la diaspora qui, le temps de leur séjour à Kinshasa, préfèrent vendre eux-mêmes sans intermédiaire… En face d’eux, une foule nombreuse qui a fini par être fidélisée… Des revendeurs et autres commissionnaires aussi! Bref, une véritable ambiance de marché!
« Les tout premiers marchés des «Bilokos» ont vu le jour vers la fin des années 80 avec des véhicules d’occasion d’Europe et la friperie, se souvient un vendeur, mais il y a seulement quelques années seulement ces marchés se sont étendus, partant de Matadi et de Boma, jusqu’à la ville de Kinshasa et ses environs. » Un autre vendeur estime que les «Bilokos», même s’ils sont pour la plupart des biens de seconde main, sont de plus en plus prisés pour le rapport qualité-prix, contrairement aux biens proposés par les commerçants indopakistanais et chinois de Kinshasa.
«La plus grande difficulté, c’est la douane!»
Les vendeurs des «Bilokos» ne font pas mystère de la manière dont ils s’approvisionnent. « Nous avons des partenaires qui achètent dans les boutiques où l’on vend des produits déjà utilisés en Europe, confient-ils; aussi sommes-nous en contact avec des familles qui veulent se débarrasser de certains objets encombrants… Quelques fois, certains biens sont ramassés dans les rues… Mais, la plus grande difficulté que nous rencontrons dans ce commerce, c’est le déplacement de la marchandise vers les consommateurs. Ici au Congo il faut avoir beaucoup d’argent pour acheminer la marchandise, car la douane coûte cher!».
Aujourd’hui à Kinshasa, plus de 60% des Kinois vivent directement ou indirectement de ces marchés des «Bilokos», dans le domaine vestimentaire en particulier à travers la friperie… Ce commerce informel contribue énormément à la vie socioéconomique de la population de Kinshasa… Aussi est-il parmi les secteurs générateurs de revenus grâce à l’emploi qu’il procure à certains jeunes Kinois.
Par ailleurs, leurs clients s’accordent tous à reconnaître que les «Bilokos» sont d’un prix abordable et de bonne qualité, et durent par conséquent plus longtemps.
Ainsi, tant que le marché kinois sera inondé des produits made in China de qualité inférieure, les «Bilokos» auront encore de beaux jours devant eux dans cette ville de la débrouille…
Princesse ISO BOMBA